Et puis, je suis tombée malade. Et je ne le savais pas, mais avec la maladie vient la solitude. Ça je n'étais pas prête. Parce que ce n'est plus la solitude réparatrice, réconfortante que j'avais toujours connue. Celle que je choisissais. Là c'est devenu un effet secondaire et indésirable, dans un quotidien déjà assez difficile. Et, comme je suis de celles que les gens cassent dans la catégorie "femme forte", personne ne semble réellement comprendre le poids de cet isolement. Isolement, c'est le bon mot, vraiment. Pourtant, vous êtes nombreux à reconnaître que les confinements étaient difficiles. Que ça a fait mal à beaucoup de monde. Mon confinement à moi, il n'a jamais pris fin. Depuis 2020, je suis chez moi. Mes sorties en 3 ans, je peux en faire le décompte sur mes 10 doigts.Mais, comme je ne suis pas effondrée, "ça va." Pourtant, moi, je le sais que ça ne va pas. Je le ressens au plus profond de moi.
Je n'aurais jamais cru, que la solitude deviendrait une traître. Une punition. Et pourtant, je la déteste autant qu'elle me rassure. Je n'ai pas connu le monde pendant, ni après covid. Et depuis mes fenêtres sur le monde extérieur, la tension permanente me fait peur. Je suis finalement, presque rassurée de ne pas affronter la folie et la bêtise des gens au quotidien. Mais finalement, le monde est-il si violent ? Ou est-ce juste une mauvaise interprétation depuis ma fenêtre ?
La maladie a fait un premier gros tris dans notre entourage. (Oui, j'inclus mon Géant, car lui aussi a souffert du manque de soutien durant le pire de ma maladie. Et je suis encore très en colère après ces personnes qui n'ont pas pris une minute de leur temps pour savoir comment LUI le vivait.) Quelques jours avant ma première hospitalisation, j'étais très prise, car c'était un week-end militant, sur deux jours. C'était assez récurrent, dans ma vie d'avant. Tous ces gens qui se disaient préoccupés de ma santé lorsqu'il fallait que je gère les collages d'affiches, l'orga d'une manif, ils ne l'étaient plus dès que j'ai franchi les portes de l'hôpital. (Sauf une. Celle qui est aujourd'hui, une vraie amie, appelons là "ma copine sur roulettes".) Et puis, les mois passent. J'ai reçu quelques messages, mais les "Tu vas mieux ?" étaient intéressés. Et comme je ne pouvais plus répondre "Oui, je vais le faire", il n'y avait plus de messages. Plus que le silence. Aujourd'hui, je ne suis plus en colère pour ça. J'étais, un levier d'action dans la cause animale locale. J'étais celle qui répondait oui à tout, pour tout le monde. J'étais leur couteau suisse. Et quand le couteau ne coupe plus, on en change.
Le plus douloureux, décevant, c'est ceux que j'aimais. Les personnes que j'estimais, à qui j'accordais du temps, quoi qu'il arrive. Quand eux, n'ont jamais franchi le seuil de ma porte, malgré mes invitations, pendant un ou deux ans... Et qu'après avoir autant brillé d'absence, ils reviennent, peut-être par politesse, peut-être par réelle envie... Je réponds non merci. Et, là encore, c'est sans méchanceté. C'est juste que mon isolement est pénible, mais il m'a rendue inapte à faire semblant. J'ai plus la force de faire des efforts, de mettre mon masque de "Je vais bien", alors que je verrais dans leur regard, ma maladie. Parce que la solitude, l'isolement est difficile, mais le regard des autres est assassin. Surtout quand, les gens se souviennent de toi avant maladie. Le choc doit être assez important et même si les gens essaient d'être discrets, polis, nous voyons bien votre regard qui change. C'est humain, très certainement, mais je n'ai pas envie de le vivre, ne m'en voulez pas. C'est trop tard.
Alors voilà . Mars 2023 est fini et il emporte avec lui un triste anniversaire. 3 ans de maladie. Une maladie non reconnue, sans recherches ni traitements qui bat des records d'indifférence. Foutu covid long ! (Mais, je ne suis toujours pas prête à écrire dessus.)
3 ans à domicile. Des journées longues et souvent dans la douleur. Tout comme mes nuits, puisque mes douleurs m'empêchent de dormir. 3 ans sans même pouvoir faire des courses. 3 ans où mes seuls compagnons sont mes chats. Ils sont devenus hypers bavards, d'ailleurs. Oups. Généralement, on reçoit le copain barbu et copine vieille à chat une à deux fois tous les 15 jours. (Oui, toujours présents et ces surnoms sont restés depuis l'époque du blog !) Et voilà , c'est ma seule fenêtre ouverte sur autre chose que mon quotidien. Imaginez vous n'avoir aucune interaction sociale ? Je suis un peu comme les personnes âgées. Si le facteur ne passe pas à la porte, je ne vois personne... (En dehors de mon Géant oui.) En fait, je réalise que c'est même pire. Les petits vieux, ils font leurs courses, ou reçoivent leur aide à domicile.... VDM.
Et bien que je gère assez bien le poids de cet isolement (après tout, je ne suis pas encore folle, je ne me suis pas fait un Wilson) j'essaie de ne pas m'imaginer ressortir, reconduire... Par peur que ça ne soit jamais plus possible et que cette idée me soit insurmontable. J'essaie, chaque jour de trouver une occupation, des projets car avoir un but le matin en me levant, autre que survivre à mes douleurs, j'entends, ça me manque.
Je ne sais pas ou je voulais en venir avec cet article, je me suis égarée dans mon brouillard cérébral. C'était l'histoire, d'une amie devenue ennemie. L'histoire montre à quelle vitesse on se retrouve seule, bien que très entourée de base. La quantité n'a jamais fait la qualité, je le savais.
Alors, entourez vous bien, vraiment bien !
C'est dans les pires moments de vos vies, que vous trouverez les gens importants.